Un siècle de tourisme,d’agriculture et un lieu de mémoire — de 1907 à l’époque actuelle
La transformation physique du paysage en symbole
Des gens tels que John Frederic Herbin et le Révérend Père André-D. Cormier, des entreprises privées comme le Dominion Atlantic Railway et la Société nationale l’Assomption, de même que l’ensemble de la communauté acadienne ont fait de Grand-Pré un lieu historique et un attrait touristique majeur en Amérique du Nord. Les monuments commémoratifs, les bâtiments et le jardin qu’ils ont créés étaient une manière symbolique de se réapproprier la région de Grand-Pré pour les descendants qui en avaient été expulsés en 1755. Par conséquent, pour les gens de descendance acadienne, Grand-Pré est devenu le lieu historique qui leur est le plus cher.
En 1907, John Frederic Herbin, un bijoutier, poète à ses heures et descendant acadien habitant à Wolfville, fit l’acquisition de terres à Grand-Pré qui étaient réputées contenir les plus importants vesti- ges remontant à la période pré-1755. Herbin avait publié en 1898 un livre sur l’histoire locale qui faisait écho aux opinions de l’historien Henri L. d’Entremont qui militait pour que les Acadiens honorent la mémoire de leurs ancêtres à Grand-Pré. Selon la tradition orale de l’époque, la nouvelle propriété de Herbin était censée contenir les vestiges de l’ancienne église paroissiale acadienne de Saint-Charles- des-Mines, celle-là même où furent emprisonnés le 5 septembre 1755 tous les Acadiens mâles de la région. Non loin de ces ruines, on disait qu’il y avait aussi un puits censé remonter à l’époque acadienne (voir Figure 2–40). Plus loin, il y avait un vieux cimetière acadien. Sur ce même terrain, poussaient de vieux saules, qui selon la tradition orale, auraient été des témoins silencieux des événements de 1755 (voir Figure 2–41).
Des gens tels que John Frederic Herbin et le Révérend Père André-D. Cormier, des entreprises privées comme le Dominion Atlantic Railway et la Société nationale l’Assomption, de même que l’ensemble de la communauté acadienne ont fait de Grand-Pré un lieu historique et un attrait touristique majeur en Amérique du Nord. Les monuments commémoratifs, les bâtiments et le jardin qu’ils ont créés étaient une manière symbolique de se réapproprier la région de Grand-Pré pour les descendants qui en avaient été expulsés en 1755. Par conséquent, pour les gens de descendance acadienne, Grand-Pré est devenu le lieu historique qui leur est le plus cher.
En 1907, John Frederic Herbin, un bijoutier, poète à ses heures et descendant acadien habitant à Wolfville, fit l’acquisition de terres à Grand-Pré qui étaient réputées contenir les plus importants vesti- ges remontant à la période pré-1755. Herbin avait publié en 1898 un livre sur l’histoire locale qui faisait écho aux opinions de l’historien Henri L. d’Entremont qui militait pour que les Acadiens honorent la mémoire de leurs ancêtres à Grand-Pré. Selon la tradition orale de l’époque, la nouvelle propriété de Herbin était censée contenir les vestiges de l’ancienne église paroissiale acadienne de Saint-Charles- des-Mines, celle-là même où furent emprisonnés le 5 septembre 1755 tous les Acadiens mâles de la région. Non loin de ces ruines, on disait qu’il y avait aussi un puits censé remonter à l’époque acadienne (voir Figure 2–40). Plus loin, il y avait un vieux cimetière acadien. Sur ce même terrain, poussaient de vieux saules, qui selon la tradition orale, auraient été des témoins silencieux des événements de 1755 (voir Figure 2–41).
L’acquisition de ces terres était une forme de reconnaissance publique de l’importance de ces terres pour les Acadiens. Le projet de Herbin voulant que le champ commémoratif de Grand-Pré devienne le repère historique le plus étroitement associé à la période d’établissement de ce pays par les Acadiens finit par convaincre d’autres intervenants qu’il était important de protéger le lieu et d’en faire un lieu de commémoration.
En 1908, le gouvernement de la Nouvelle-Écosse a promulgué une loi visant à reconnaître et à constituer en société les administra- teurs des terrains historiques de Grand-Pré. C’était là une première tentative par un gouvernement à quelque niveau que ce soit de sau- vegarder le lieu de Grand-Pré.
En 1917, Herbin et les autres administrateurs ont vendu la pro- priété contenant les vestiges au Dominion Atlantic Railway (DAR), à la condition que le site de l’église soit cédé par acte notarié au peuple acadien pour que ce dernier puisse ériger un monument à la mémoire de ses ancêtres. La déclaration suivante de Herbin explique sa vision :
En 1908, le gouvernement de la Nouvelle-Écosse a promulgué une loi visant à reconnaître et à constituer en société les administra- teurs des terrains historiques de Grand-Pré. C’était là une première tentative par un gouvernement à quelque niveau que ce soit de sau- vegarder le lieu de Grand-Pré.
En 1917, Herbin et les autres administrateurs ont vendu la pro- priété contenant les vestiges au Dominion Atlantic Railway (DAR), à la condition que le site de l’église soit cédé par acte notarié au peuple acadien pour que ce dernier puisse ériger un monument à la mémoire de ses ancêtres. La déclaration suivante de Herbin explique sa vision :
La restauration proposée du parc du souvenir comprendra des bâtiments qu’érigeront les Acadiens sur le lieu qu’oc- cupait l’église Saint-Charles. Une statue d’Évangéline repo- sant sur un socle en pierre et accompagnée de tablettes en bronze sera construite sur l’espace entre la croix de pierre et le vieux puits. Des chemins, sentiers et platebandes de fleurs ainsi que diverses structures marquant les divers endroits ajouteront à l’attrait du lieu. De là on pourra aper- cevoir les vastes étendues de la « grand pré » comme un monument au travail acharné des ancêtres. [Traduction]
Le DAR a donc assumé la responsabilité pour le site et a retenu les ser- vices d’un architecte canadien de renom, Percy Nobbs, qu’il a chargé de concrétiser la vision de Herbin. L’architecte a élaboré des plans détaillés pour le terrain avec des platebandes de fleurs et des sentiers et il a prévu des endroits où ériger des monuments (voir Figure 2-42).
Avec les dessins de Nobbs, l’entreprise ferroviaire a aménagé un parc où pourraient venir les touristes désireux de visiter l’endroit rendu célèbre par le poème épique de Longfellow. Beaucoup de visiteurs ont afflué dans ce parc — un mélange de jardin des plantes et de cimetière commémoratif — pour se souvenir de la tragédie vécue par les Acadiens en 1755. Le premier élément artistique d’importance à être ajouté au paysage a été une statue en bronze d’Évangéline qui a été dévoilée en 1920. La statue qui est l’œuvre du sculpteur québécois réputé Henri Hébert a été inspirée par un dessin du père de l’artiste, lui aussi sculpteur, Louis-Philippe Hébert (voir Figure 2–43). Ces deux artistes sont incidemment de descendance acadienne.
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Au cours des années 1920 et 1930, le DAR, le ministère responsable du tourisme en Nouvelle-Écosse et de nombreuses entreprises privées eurent recours dans leur publicité à des images et des slogans inspirés du thème de Grand-Pré et d’Évangéline. Il y eut parallèlement une mise en marché marquée d’Évangéline : diverses représentations de l’héroïne fictive apparurent sur toute une gamme de produits allant des boissons gazeuses aux chocolats en passant par les automobiles.
Malgré la commercialisation et l’association fréquente avec un personnage littéraire, dans les années 1920, les Acadiens commen- cèrent à s’intéresser de plus en plus à Grand-Pré et à s’attacher à sa valeur évocatrice d’une terre d’origine symboliquement reconquise incarnant le legs de leur tragique expulsion forcée. En 1919, un prêtre du Nouveau-Brunswick, le père André D. Cormier, prit part à des négociations en vue de faire l’acquisition de la propriété de Grand-Pré pour y bâtir une église commémorative. En 1921, la Société nationale l’Assomption (le précurseur de la Société nationale de l’Acadie [SNA] d’aujourd’hui) tint une partie de sa huitième convention nationale à Grand-Pré. Là, la SNA prit officiellement possession du site et lança une campagne de financement pour bâtir une Église Souvenir, sur les ruines présumées de l’église paroissiale d’antan ou à proximité de celles-ci (voir Figure 2-44). Le père Cormier devint le président fondateur du comité responsable de l’Église Souvenir et se mit en train de lancer plusieurs campagnes de collectes de fonds. Toute la diaspora des provinces Maritimes, du Québec, de la Louisiane et de la France fut sollicitée pour contribuer au financement. La construction de l’église refléta l’essor qu’avait connu le nationalisme acadien depuis les années 1880. Étant donné qu’elle avait connu un certain nombre de victoires pour faire valoir ses droits et son identité, la communauté acadienne estimait qu’il était maintenant temps de poser un tel geste symbolique. Les efforts de commémoration de la communauté acadienne à Grand-Pré se sont poursuivis en 1923. Ceux-ci ont alors réuni des fonds pour qu’une statue de la sainte patronne acadienne, Notre- Dame de l’Assomption, soit réalisée et placée dans l’église nouvelle- ment construite (voir Figures 2–45 et 2–46). L’année suivante, un groupe d’Acadiens des provinces Maritimes et du Québec de même que des non-Acadiens qui s’intéressaient à l’histoire de l’Acadie, firent ériger un poignant symbole à la mémoire de la Déportation de 1755. Il s’agit d’une croix de fer qui fut érigée en bordure de la ligne du chemin de fer du DAR, près d’un ruisseau tari, à environ deux kilomètres du site de Grand-Pré. On croyait alors que c’était là que les ancêtres avaient été embarqués à bord de petits bateaux durant la Déportation. Des recherches ultérieures démon- trèrent que le lieu de l’embarquement se situait en fait à Horton Landing, où la croix fut déménagée en 2005. Jusqu’au milieu des années 1950, des citoyens intéressés et des groupes organisés principalement du Canada mais aussi des États- Unis étaient responsables de toutes les activités commémoratives se déroulant à Grand-Pré. En 1955, tous les éléments importants de ce qui est maintenant devenu un lieu de mémoire (voir plus loin dans ce chapitre) étaient déjà en place depuis trente ans : l’Église Souvenir, la statue d’Évangéline, la Croix de la Déportation, les saules cente- naires, une croix de pierre marquant le cimetière acadien (la croix Herbin), le puits et les platebandes de fleurs. Au mois de mai 1955, la Commission des lieux et monuments historiques du Canada, l’entité indépendante chargée de recommander les désignations d’importance historique nationale au ministre fédéral responsable, a conclu que le parc du souvenir de Grand-Pré possédait les caractéristiques historiques nécessaires pour en faire un lieu historique national. Les négociations se sont déroulées au cours de l’année suivante et, le 14 décembre 1956, la Société nationale l’Assomption a mis la dernière main à la vente de Grand-Pré au gouvernement du Canada. Cinq années plus tard, soit en 1961, le ministère fédéral responsable des lieux historiques inaugurait le lieu historique national de Grand-Pré. Depuis lors, Parcs Canada a veillé à l’entretien des monuments commémoratifs et travaillé en étroite collaboration avec des repré- sentants de la communauté acadienne. Depuis le milieu des années 1990, la Société Promotion Grand-Pré, un nouveau groupe représen- tant la communauté acadienne, a travaillé de près avec Parcs Canada pour promouvoir et mettre en valeur le lieu historique national tout en poursuivant la tradition d’ériger des monuments et d’organiser des activités qui reflètent l’identité acadienne et son attachement à ce lieu. |
Un lieu de ralliement pour la diaspora
Depuis le début du XXe siècle, de nombreux événements ont eu lieu à Grand-Pré qui ont confirmé son rôle au cœur de l’Acadie et comme l’endroit le plus étroitement associé à l’identité acadienne. Parmi ces événements, citons le Congrès mondial acadien, des activités com- mémorant la Déportation, des pèlerinages et des activités culturelles.
Le premier événement d’importance à avoir lieu à Grand-Pré a été lié à une convention nationale. En 1921, la huitième convention générale de la Société nationale l’Assomption a eu lieu à Pointe-de- l’Église dans le Sud-Ouest de la Nouvelle-Écosse. Celle-ci a pris fin par un pèlerinage à Grand-Pré au cours duquel les participants ont officiellement pris possession du terrain qui contenait les vestiges présumés de l’ancienne église paroissiale de Saint-Charles-des-Mines. C’était là un geste d’une grande portée symbolique qui mettait en lumière un événement historique d’importance pour le peuple aca- dien qui récupérait symboliquement une partie importante de sa terre ancestrale. L’année suivante, des centaines d’Acadiens sont reve- nus à Grand-Pré pour célébrer la première messe à y être dite depuis 1755 (voir Figure 2–47). La messe a été célébrée par le premier évêque acadien Monseigneur Édouard LeBlanc. À cette occasion, le clergé a procédé à la bénédiction de la pierre angulaire de l’Église Souvenir, complétant ainsi l’érection du symbole le plus important de l’Acadie.
Depuis le début du XXe siècle, de nombreux événements ont eu lieu à Grand-Pré qui ont confirmé son rôle au cœur de l’Acadie et comme l’endroit le plus étroitement associé à l’identité acadienne. Parmi ces événements, citons le Congrès mondial acadien, des activités com- mémorant la Déportation, des pèlerinages et des activités culturelles.
Le premier événement d’importance à avoir lieu à Grand-Pré a été lié à une convention nationale. En 1921, la huitième convention générale de la Société nationale l’Assomption a eu lieu à Pointe-de- l’Église dans le Sud-Ouest de la Nouvelle-Écosse. Celle-ci a pris fin par un pèlerinage à Grand-Pré au cours duquel les participants ont officiellement pris possession du terrain qui contenait les vestiges présumés de l’ancienne église paroissiale de Saint-Charles-des-Mines. C’était là un geste d’une grande portée symbolique qui mettait en lumière un événement historique d’importance pour le peuple aca- dien qui récupérait symboliquement une partie importante de sa terre ancestrale. L’année suivante, des centaines d’Acadiens sont reve- nus à Grand-Pré pour célébrer la première messe à y être dite depuis 1755 (voir Figure 2–47). La messe a été célébrée par le premier évêque acadien Monseigneur Édouard LeBlanc. À cette occasion, le clergé a procédé à la bénédiction de la pierre angulaire de l’Église Souvenir, complétant ainsi l’érection du symbole le plus important de l’Acadie.
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La Croix de la Déportation, un autre symbole important de l’expérience acadienne, a été érigée en 1924. La croix fut dévoilée pendant le premier de deux pèlerinages organisés par le quotidien Le Devoir de Montréal (voir Figure 2–48).
À cette époque, le fondateur du journal, Henri Bourassa, encourageait les Canadiens français de descendance acadienne à se joindre à lui pour le retour en « terre sacrée », la « terre de mémoire » à Grand-Pré, ce que les gens ont fait en grand nombre. La Croix de la Déportation, telle qu’on l’appelle, a depuis inspiré les artistes et les Acadiens du monde entier puisqu’elle symbolise le souvenir de la Déportation mais aussi l’identité d’un peuple. Depuis 2003, cette croix a été reproduite à divers endroits où les Acadiens ont abouti ou se sont installés, y compris en Louisiane, au Nouveau-Brunswick, en Nouvelle-Écosse, à l’Île-du-Prince-Édouard, à Terre-Neuve et dans les îles Saint-Pierre-et-Miquelon. D’autres croix seront bientôt érigées en France, en Nouvelle-Angleterre et en Grande-Bretagne. Le 175e anniversaire de la Déportation en 1930 a été le premier événement majeur à réunir des Acadiens du Canada et des États-Unis et a en quelque sorte scellé le rôle de Grand-Pré comme le cœur de l’Acadie. Cette année-là, le sénateur de la Louisiane, Dudley LeBlanc, a été à la tête d’une délégation d’« Evangelines » qui est allée au Québec, au Nouveau-Brunswick et en Nouvelle-Écosse où les mem- bres ont pris part aux célébrations anniversaires de Grand-Pré (voir Figure 2–49). À cette époque, le fondateur du journal, Henri Bourassa, encou- rageait les Canadiens français de descendance acadienne à se join- dre à lui pour le retour en « terre sacrée », la « terre de mémoire » à Grand-Pré, ce que les gens ont fait en grand nombre. La Croix de la Déportation, telle qu’on l’appelle, a depuis inspiré les artistes et les Acadiens du monde entier puisqu’elle symbolise le souvenir de la Déportation mais aussi l’identité d’un peuple. Depuis 2003, cette croix a été reproduite à divers endroits où les Acadiens ont abouti ou se sont installés, y compris en Louisiane, au Nouveau-Brunswick, en Nouvelle-Écosse, à l’Île-du-Prince-Édouard, à Terre-Neuve et dans les îles Saint-Pierre-et-Miquelon. D’autres croix seront bientôt érigées en France, en Nouvelle-Angleterre et en Grande-Bretagne. Le 175e anniversaire de la Déportation en 1930 a été le premier événement majeur à réunir des Acadiens du Canada et des États-Unis et a en quelque sorte scellé le rôle de Grand-Pré comme le cœur de l’Acadie. Cette année-là, le sénateur de la Louisiane, Dudley LeBlanc, a été à la tête d’une délégation d’« Evangelines » qui est allée au Québec, au Nouveau-Brunswick et en Nouvelle-Écosse où les mem- bres ont pris part aux célébrations anniversaires de Grand-Pré (voir Figure 2–49). Puis en 1994, les Acadiens ont commencé à organiser des événements conçus expressément pour rassembler les membres de la diaspora. Le Congrès mondial acadien, qui a lieu à tous les cinq ans dans une région acadienne est une manifestation de la culture acadienne et l’occasion pour les Acadiens ayant des ancêtres communs de se réunir dans un contexte de retrouvailles. Le premier congrès mondial acadien eut lieu dans le Sud-Est du Nouveau-Brunswick, le deuxième s’est tenu dans la région nommée Acadiana au Sud-Ouest de la Louisiane (aux États-Unis), et le troisième s’est tenu en Nouvelle-Écosse. Ce troi- sième Congrès qui a eu lieu en 2004, soulignait aussi le 400e anni- versaire de la fondation de l’Acadie, marqué par l’établissement de l’île Sainte-Croix. Lors de ce congrès — comme plusieurs fois auparavant — Grand-Pré a été le théâtre d’une messe en plein air qui a attiré 10 000 Acadiens. L’année suivante, en 2005, Grand-Pré a encore une fois accueilli des milliers d’Acadiens, pour commémorer cette fois le 250e anniver- saire de la Déportation. Cette activité soulignait la vitalité du peuple acadien et de sa culture. La Croix de la Déportation fut alors déména- gée à Horton Landing, là où elle se trouve encore aujourd’hui et là où en 1755 les Acadiens ont dû monter à bord des bateaux qui devaient les emmener aux quatre coins du monde (voir Figure 2–51). Outre ces anniversaires, chaque année le 5 septembre, une activité a lieu à Grand-Pré pour commémorer ce jour en 1755 où les hommes et les garçons de Grand-Pré ont été emprisonnés dans l’église puis entassés à bord des bateaux. Des centaines d’Acadiens viennent marcher de l’Église Souvenir jusqu’à Horton Landing, se remémorant la marche de 1755 des Acadiens de Grand-Pré en route vers l’exil. Au fil des ans, Grand-Pré a été le théâtre de nombreuses activités sociales et culturelles. En 2008, le comité organisateur des Jeux de l’Acadie a réuni 1500 jeunes athlètes à Grand-Pré pour qu’ils se fami- liarisent avec leur histoire et célèbrent la fierté de l’Acadie. |
Entretien des digues et des aboiteaux à Grand-Pré
Ce paysage à forte connotation symbolique est néanmoins demeuré un paysage résolument agricole. Le marais de Grand-Pré a été entre- tenu et il y a eu des expansions sur le flanc ouest. La digue nord-est dans l’île Long et des parties des digues de l’est érigées dans les années 1940 ont été placées parfois derrière la ligne des anciennes digues, parfois devant celles-ci. La digue Wickwire, qui a été construite au XIXe siècle, a été abandonnée à nouveau en 1932 après des années de dégradation à la suite de tempêtes violentes. Elle a néanmoins été rebâtie en partie en 1959. Les empreintes de sections d’autres digues ont été déplacées en fonction de leur capacité de résister aux assauts des marées. Dans chacun des cas, la décision de bâtir des digues se faisait en fonction de la capacité de maintenir l’intégrité du réseau de digues et d’aboiteaux.
Les digues construites dans les années 1940 ont fait partie d’une initiative gouvernementale connue sous le nom de Programme d’ur- gence. En 1943, le gouvernement fédéral et le gouvernement des pro- vinces de la Nouvelle-Écosse et du Nouveau-Brunswick ont mis sur pied un comité de réhabilitation des digues des provinces Maritimes (voir Figure 2–52).
A suivi en 1948 un programme encore plus ambitieux par la création, aux termes d’une loi promulguée par le Parlement du Canada, de l’Administration de réhabilitation des digues des provin- ces Maritimes. La tâche de l’entretien de tout les marais des provin- ces Maritimes a été traitée comme un seul projet, ce qui a permis de débloquer des fonds considérables. À la fin des années 1960, tous les projets d’envergure de rebâtir les digues et de remplacer les aboi- teaux étaient complétés, et le gouvernement fédéral s’est alors retiré du projet. La supervision des digues a alors été transférée aux provinces, responsabilité que celles-ci assument encore à ce jour.
Tout au long de siècles d’évolution et de changements, les fermiers de Grand-Pré ont conservé leur méthode distinctive d’érection et d’entretien du marais original. La conception des aboiteaux n’a pas changé même si de nouveaux matériaux rehaussent maintenant leur fiabilité et leur durée de vie utile. Les digues sont encore construi- tes à l’aide de mottes de terre, et encore aujourd’hui la végétation indigène les protège. Pendant des siècles, les fermiers locaux ont fait l’expérience de diverses combinaisons de matériaux pour renforcer les digues — utilisant parfois des roches, parfois des planches de bois maintenues ensemble avec des baguettes servant de parements (que l’on appelait corps morts). Pourtant la technologie de base est demeu- rée la même. Les ruisseaux ont été gardés intacts pour garantir l’effi- cacité du systeme hydrographique.
Les fermiers d’aujourd’hui — dont certains sont des descendants des Planters de la Nouvelle-Angleterre, de nombreux autres, des descendants de souche néerlandaise venus en Amérique après la Seconde Guerre mondiale — conservent toujours les connaissances de l’érection et de l’entretien des digues. Si rares sont les fermiers locaux qui savent encore se servir d’une ferrée pour découper des mottes de terre, nombre d’entre eux comprennent bien la concep- tion appropriée des digues et le fonctionnement du drainage et des aboiteaux, à en juger par les digues et les aboiteaux privés qui conti- nuent à s’ériger sur le territoire. Le ministère de l’Agriculture possède certaines connaissances, mais il recourt sans cesse à l’expérience des fermiers pour l’entretien des digues.
La gestion issue de la communauté se poursuit aujourd’hui au IIIe millénaire. Les fermiers du Grand Pré Marsh Body sont individuel- lement propriétaires des terres, mais ils partagent les ressources et prennent des décisions collectivement quant à l’entretien du marais. Les fermiers n’ont pas directement la responsabilité des digues, mais ils conservent un rôle essentiel dans l’entretien et l’érection des digues. Leur méthode de gestion garde vivants une préoccupa- tion collective à l’égard de ce paysage agricole et le désir individuel de prospérité. À travers les grands projets du gouvernement fédéral et provincial des 70 dernières années, le Grand Pré Marsh Body a su conserver son rôle. Les archives et les procès-verbaux conservés par le Grand Pré Marsh Body remontent à la fin du XVIIIe siècle. Il s’agit de la plus active et de la plus ancienne organisation en son genre en Amérique du Nord.
Ce paysage à forte connotation symbolique est néanmoins demeuré un paysage résolument agricole. Le marais de Grand-Pré a été entre- tenu et il y a eu des expansions sur le flanc ouest. La digue nord-est dans l’île Long et des parties des digues de l’est érigées dans les années 1940 ont été placées parfois derrière la ligne des anciennes digues, parfois devant celles-ci. La digue Wickwire, qui a été construite au XIXe siècle, a été abandonnée à nouveau en 1932 après des années de dégradation à la suite de tempêtes violentes. Elle a néanmoins été rebâtie en partie en 1959. Les empreintes de sections d’autres digues ont été déplacées en fonction de leur capacité de résister aux assauts des marées. Dans chacun des cas, la décision de bâtir des digues se faisait en fonction de la capacité de maintenir l’intégrité du réseau de digues et d’aboiteaux.
Les digues construites dans les années 1940 ont fait partie d’une initiative gouvernementale connue sous le nom de Programme d’ur- gence. En 1943, le gouvernement fédéral et le gouvernement des pro- vinces de la Nouvelle-Écosse et du Nouveau-Brunswick ont mis sur pied un comité de réhabilitation des digues des provinces Maritimes (voir Figure 2–52).
A suivi en 1948 un programme encore plus ambitieux par la création, aux termes d’une loi promulguée par le Parlement du Canada, de l’Administration de réhabilitation des digues des provin- ces Maritimes. La tâche de l’entretien de tout les marais des provin- ces Maritimes a été traitée comme un seul projet, ce qui a permis de débloquer des fonds considérables. À la fin des années 1960, tous les projets d’envergure de rebâtir les digues et de remplacer les aboi- teaux étaient complétés, et le gouvernement fédéral s’est alors retiré du projet. La supervision des digues a alors été transférée aux provinces, responsabilité que celles-ci assument encore à ce jour.
Tout au long de siècles d’évolution et de changements, les fermiers de Grand-Pré ont conservé leur méthode distinctive d’érection et d’entretien du marais original. La conception des aboiteaux n’a pas changé même si de nouveaux matériaux rehaussent maintenant leur fiabilité et leur durée de vie utile. Les digues sont encore construi- tes à l’aide de mottes de terre, et encore aujourd’hui la végétation indigène les protège. Pendant des siècles, les fermiers locaux ont fait l’expérience de diverses combinaisons de matériaux pour renforcer les digues — utilisant parfois des roches, parfois des planches de bois maintenues ensemble avec des baguettes servant de parements (que l’on appelait corps morts). Pourtant la technologie de base est demeu- rée la même. Les ruisseaux ont été gardés intacts pour garantir l’effi- cacité du systeme hydrographique.
Les fermiers d’aujourd’hui — dont certains sont des descendants des Planters de la Nouvelle-Angleterre, de nombreux autres, des descendants de souche néerlandaise venus en Amérique après la Seconde Guerre mondiale — conservent toujours les connaissances de l’érection et de l’entretien des digues. Si rares sont les fermiers locaux qui savent encore se servir d’une ferrée pour découper des mottes de terre, nombre d’entre eux comprennent bien la concep- tion appropriée des digues et le fonctionnement du drainage et des aboiteaux, à en juger par les digues et les aboiteaux privés qui conti- nuent à s’ériger sur le territoire. Le ministère de l’Agriculture possède certaines connaissances, mais il recourt sans cesse à l’expérience des fermiers pour l’entretien des digues.
La gestion issue de la communauté se poursuit aujourd’hui au IIIe millénaire. Les fermiers du Grand Pré Marsh Body sont individuel- lement propriétaires des terres, mais ils partagent les ressources et prennent des décisions collectivement quant à l’entretien du marais. Les fermiers n’ont pas directement la responsabilité des digues, mais ils conservent un rôle essentiel dans l’entretien et l’érection des digues. Leur méthode de gestion garde vivants une préoccupa- tion collective à l’égard de ce paysage agricole et le désir individuel de prospérité. À travers les grands projets du gouvernement fédéral et provincial des 70 dernières années, le Grand Pré Marsh Body a su conserver son rôle. Les archives et les procès-verbaux conservés par le Grand Pré Marsh Body remontent à la fin du XVIIIe siècle. Il s’agit de la plus active et de la plus ancienne organisation en son genre en Amérique du Nord.
Des siècles de progrès et d’adaptations
Dans le passé, le marais a été utilisé pour les récoltes pendant l’été et comme un pâturage commun à l’automne. Ceci a permis aux éléments nutritifs — sous forme de fumier — de retourner dans la terre. Les fermiers se réunissaient à Grand-Pré, tout près du marais pour diviser leurs troupeaux en deux, dont l’une moitié irait dans la section est et l’autre, à l’ouest. Ils identifiaient les outils individuels de marquage, clôturaient l’enceinte, marquaient les animaux et les lâchaient dans le marais. Cette pratique s’est poursuivie jusque dans les années 1970, lorsque les récoltes sont devenues plus sensibles à l’impact du bétail et lorsque d’autres techniques agricoles ont permis de prolonger la saison. De nos jours, le bétail est encore envoyé paître sur le marais, mais uniquement dans des zones précises (voir Figure 2–53).
À compter des années 1970, les fermiers ont commencé à mettre l’ac- cent sur le drainage de surface de ces sols. Selon leur méthode de drainage, appelée « terrassement de mise à niveau », il s’agit de façon- ner la surface d’un champ de manière à ce que l’excédent des eaux de pluie puisse s’écouler dans des fossés herbeux (voir Figure 2–54).
À Grand-Pré, le terrassement de mise à niveau consiste en fossés ouverts ayant une dénivellation de 30 centimètres sur une distance de 300 mètres qui s’écoulent dans les ruisseaux. De cette manière, les sols s’assèchent plus rapidement et conservent mieux la cha- leur. Les fermiers peuvent commencer à travailler la terre plus tôt au printemps et à cultiver une diversité de récoltes. Les récoltes les plus courantes sont la pâture, le foin, les céréales, le soja, la luzerne et quelques légumes. Lorsque les étés sont secs, les sols du marais retiennent mieux l’eau que les sols situés dans les hauteurs.
De nos jours, de nombreux fermiers élèvent du bétail produi- sant du lait et cultivent des fourrages pour les animaux. Étant donné que la production laitière est une industrie réglementée, les fermiers ont une source de revenus stables. La plupart des récoltes du marais sont destinées à l’alimentation du bétail, tant pour la consommation locale que la vente. Les fermiers de Grand-Pré sont reconnus pour leur avant-gardisme dans les techniques, les outils et l’utilisation des engrais, mais ils sont aussi reconnus comme gardiens de leurs tra- ditions. Aujourd’hui, la totalité du marais sert à des fins agricoles et la région s’enorgueillit de ce qu’elle est l’une des communautés agricoles les plus productives du Canada atlantique. La longévité de l’utilisation agricole des terres est la preuve que les fermiers d’ici se sont continuellement adaptés aux conditions de l’environnement et qu’ils ont misé sur la gestion communautaire. Leur avenir réside dans la continuation de leur rôle de gardiens de ce paysage agricole. Leur succès naîtra de leur travail acharné, de leur fierté et d’une expé- rience acquise au cours des siècles.
Dans le passé, le marais a été utilisé pour les récoltes pendant l’été et comme un pâturage commun à l’automne. Ceci a permis aux éléments nutritifs — sous forme de fumier — de retourner dans la terre. Les fermiers se réunissaient à Grand-Pré, tout près du marais pour diviser leurs troupeaux en deux, dont l’une moitié irait dans la section est et l’autre, à l’ouest. Ils identifiaient les outils individuels de marquage, clôturaient l’enceinte, marquaient les animaux et les lâchaient dans le marais. Cette pratique s’est poursuivie jusque dans les années 1970, lorsque les récoltes sont devenues plus sensibles à l’impact du bétail et lorsque d’autres techniques agricoles ont permis de prolonger la saison. De nos jours, le bétail est encore envoyé paître sur le marais, mais uniquement dans des zones précises (voir Figure 2–53).
À compter des années 1970, les fermiers ont commencé à mettre l’ac- cent sur le drainage de surface de ces sols. Selon leur méthode de drainage, appelée « terrassement de mise à niveau », il s’agit de façon- ner la surface d’un champ de manière à ce que l’excédent des eaux de pluie puisse s’écouler dans des fossés herbeux (voir Figure 2–54).
À Grand-Pré, le terrassement de mise à niveau consiste en fossés ouverts ayant une dénivellation de 30 centimètres sur une distance de 300 mètres qui s’écoulent dans les ruisseaux. De cette manière, les sols s’assèchent plus rapidement et conservent mieux la cha- leur. Les fermiers peuvent commencer à travailler la terre plus tôt au printemps et à cultiver une diversité de récoltes. Les récoltes les plus courantes sont la pâture, le foin, les céréales, le soja, la luzerne et quelques légumes. Lorsque les étés sont secs, les sols du marais retiennent mieux l’eau que les sols situés dans les hauteurs.
De nos jours, de nombreux fermiers élèvent du bétail produi- sant du lait et cultivent des fourrages pour les animaux. Étant donné que la production laitière est une industrie réglementée, les fermiers ont une source de revenus stables. La plupart des récoltes du marais sont destinées à l’alimentation du bétail, tant pour la consommation locale que la vente. Les fermiers de Grand-Pré sont reconnus pour leur avant-gardisme dans les techniques, les outils et l’utilisation des engrais, mais ils sont aussi reconnus comme gardiens de leurs tra- ditions. Aujourd’hui, la totalité du marais sert à des fins agricoles et la région s’enorgueillit de ce qu’elle est l’une des communautés agricoles les plus productives du Canada atlantique. La longévité de l’utilisation agricole des terres est la preuve que les fermiers d’ici se sont continuellement adaptés aux conditions de l’environnement et qu’ils ont misé sur la gestion communautaire. Leur avenir réside dans la continuation de leur rôle de gardiens de ce paysage agricole. Leur succès naîtra de leur travail acharné, de leur fierté et d’une expé- rience acquise au cours des siècles.
Un lieu de mémoire dont la pertinence dure
Depuis le début des années 1980, il se célèbre chaque année à Grand- Pré, à la fin du mois de juillet, les Journées acadiennes.
Cette activité dure une semaine, attire des milliers de visiteurs, et met à l’honneur la culture, l’histoire et les arts acadiens. Une acti- vité commémorative a lieu près de la Croix de la Déportation au cours de la semaine, soit le 28 juillet, jour désigné pour la Commémoration de la Déportation (voir Figure 2–55).
Le Parlement du Canada a décrété en 2003 qu’un jour national de commémoration de la Déportation serait désigné et ce jour a été célébré pour une première fois en 2005. Ce geste résultait des efforts individuels et collectifs de députés, de membres de la communauté cajun en Louisiane et de la Société nationale de l’Acadie qui ten- taient d’obtenir de la Couronne britannique une excuse officielle et la reconnaissance de l’impact de la Déportation sur la communauté acadienne. La Proclamation royale signée par la reine Elizabeth II, reine du Canada, comportait les énoncés suivants :
Depuis le début des années 1980, il se célèbre chaque année à Grand- Pré, à la fin du mois de juillet, les Journées acadiennes.
Cette activité dure une semaine, attire des milliers de visiteurs, et met à l’honneur la culture, l’histoire et les arts acadiens. Une acti- vité commémorative a lieu près de la Croix de la Déportation au cours de la semaine, soit le 28 juillet, jour désigné pour la Commémoration de la Déportation (voir Figure 2–55).
Le Parlement du Canada a décrété en 2003 qu’un jour national de commémoration de la Déportation serait désigné et ce jour a été célébré pour une première fois en 2005. Ce geste résultait des efforts individuels et collectifs de députés, de membres de la communauté cajun en Louisiane et de la Société nationale de l’Acadie qui ten- taient d’obtenir de la Couronne britannique une excuse officielle et la reconnaissance de l’impact de la Déportation sur la communauté acadienne. La Proclamation royale signée par la reine Elizabeth II, reine du Canada, comportait les énoncés suivants :
[...] Attendu que le 28 juillet 1755, la Couronne, dans le cadre de l’administration des affaires de la colonie britan- nique de la Nouvelle-Écosse, a pris la décision de déporter les Acadiens; [...]
[...] Attendu que Nous reconnaissons les faits historiques mentionnés précédemment ainsi que les épreuves et souf- frances subies par les Acadiens lors du Grand Dérangement; [...]
[...] Attendu que Nous souhaitons que les Acadiens puis- sent tourner la page sur cette période sombre de leur his- toire; [...]
La proclamation se termine par la désignation du 28 juillet de chaque année comme journée de commémoration du Grand Dérangement; le 28 juillet est incidemment le jour où l’ordre de déportation a été signé par le gouverneur de Halifax en 1755. La proclamation royale a été un autre jalon important pour sensibi- liser le public canadien aux événements entourant la Déportation. La première année, la journée de commémoration a été célébrée au Nouveau-Brunswick et en Nouvelle-Écosse par le dévoilement des deux premiers monuments à l’Odyssée acadienne, qui marquent les endroits où les Acadiens ont été déportés et les lieux où ils se sont établis, partout dans le monde.
Depuis 2005, une activité interconfessionnelle a lieu ce jour-là à la Croix de la Déportation, sur l’initiative de résidants non acadiens (voir Figure 2–56).
Depuis 2005, une activité interconfessionnelle a lieu ce jour-là à la Croix de la Déportation, sur l’initiative de résidants non acadiens (voir Figure 2–56).
Participent d’ordinaire à la cérémonie des prêtres catholiques, des ministres anglicans, des aînés mi’kmaqs et récemment des membres d’autres confessions religieuses. D’ordinaire il se célèbre une messe à l’Église des covenantaires à Grand-Pré suivie d’une marche de cette église à l’Église Souvenir.
Cette dernière activité est significative du fait qu’elle regroupe des non-Acadiens dans une activité de commémoration d’impor- tance. En fait, au fil des années, les non-Acadiens ont joué un rôle primordial pour appuyer les aspirations des Acadiens de se réappro- prier Grand-Pré, du moins symboliquement. Depuis les premières années du XXe siècle, lorsqu’un bijoutier local d’origine acadienne fit l’acquisition des terres et que le DAR mit le site en valeur pour le tourisme, et ce, jusqu’à la participation locale de la communauté actuelle, les non-Acadiens ont appris l’existence de la Déportation et son incidence sur les Acadiens et ils ont travaillé en vue de la com- mémoration du patrimoine acadien à Grand-Pré. Un homme politi- que acadien, Pascal Poirier, faisait remarquer en 1917 que le « retour à Grand-Pré [constitue ] la résurrection symbolique de notre chère Acadie. Ce réveil d’un passé douloureux n’a rien qui puisse froisser nos amis et concitoyens de nationalité étrangère. Tout au contraire, une pensée de sincère de fraternité et d’apaisement y préside. » Cet esprit continue de caractériser la nature des relations à Grand-Pré. |
La relation entre les Acadiens et les non-Acadiens a été un exer- cice constant de compréhension et de respect mutuels. Grand-Pré n’est pas un paysage contesté, étant donné que les résidants locaux et les autres non-Acadiens reconnaissent depuis longtemps les couches acadiennes du patrimoine ici présent. Depuis les années 1930, la com- munauté locale célèbre le festival des pommiers en fleurs comme
moyen de faire la promotion des produits agricoles de la vallée d’An- napolis, mais aussi pour célébrer la beauté du paysage et l’histoire acadienne qui a servi de toile de fond à Evangeline.
Récemment, pendant le Congrès mondial acadien de 2004 et le 250e anniversaire de la Déportation en 2005, la communauté locale a travaillé pour accueillir les Acadiens dans leur terre ancestrale en les y recevant et en offrant les ressources nécessaires à la tenue des événements. Il convient de souligner un moment particulièrement saisissant. Un fermier dont la famille a vécu dans la région de Grand- Pré depuis les années 1760 a offert d’accueillir les descendants de la famille acadienne qui était autrefois propriétaire de cette terre. Des centaines de personnes ont assisté à ces retrouvailles, les descendants de la famille Thibodeau du Canada et de la Louisiane, de même que les membres de la famille des propriétaires actuels, les Shaw.
Des gestes comme celui-ci sont des indicateurs importants d’un désir de compréhension mutuel, d’un désir de se souvenir et d’ap- prendre de l’expérience. Ils permettent aux Acadiens de se réappro- prier leur terre ancestrale symboliquement et pacifiquement. Ils sont aussi la preuve des efforts constants en vue de la réconciliation, efforts qu’anticipait Pascal Poirier au début du XXe siècle quand il disait : « [l’acquisition des terres de Grand-Pré] fera que nous serons encore une fois chez nous, à Grand-Pré, possesseurs du sol antique, parmi nos citoyens d’origine étrangère, devenus nos amis ». Le Paysage de Grand-Pré continue de jouer un rôle central dans la réappropriation par les Acadiens de leur terre ancestrale.
moyen de faire la promotion des produits agricoles de la vallée d’An- napolis, mais aussi pour célébrer la beauté du paysage et l’histoire acadienne qui a servi de toile de fond à Evangeline.
Récemment, pendant le Congrès mondial acadien de 2004 et le 250e anniversaire de la Déportation en 2005, la communauté locale a travaillé pour accueillir les Acadiens dans leur terre ancestrale en les y recevant et en offrant les ressources nécessaires à la tenue des événements. Il convient de souligner un moment particulièrement saisissant. Un fermier dont la famille a vécu dans la région de Grand- Pré depuis les années 1760 a offert d’accueillir les descendants de la famille acadienne qui était autrefois propriétaire de cette terre. Des centaines de personnes ont assisté à ces retrouvailles, les descendants de la famille Thibodeau du Canada et de la Louisiane, de même que les membres de la famille des propriétaires actuels, les Shaw.
Des gestes comme celui-ci sont des indicateurs importants d’un désir de compréhension mutuel, d’un désir de se souvenir et d’ap- prendre de l’expérience. Ils permettent aux Acadiens de se réappro- prier leur terre ancestrale symboliquement et pacifiquement. Ils sont aussi la preuve des efforts constants en vue de la réconciliation, efforts qu’anticipait Pascal Poirier au début du XXe siècle quand il disait : « [l’acquisition des terres de Grand-Pré] fera que nous serons encore une fois chez nous, à Grand-Pré, possesseurs du sol antique, parmi nos citoyens d’origine étrangère, devenus nos amis ». Le Paysage de Grand-Pré continue de jouer un rôle central dans la réappropriation par les Acadiens de leur terre ancestrale.